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Podcast intéressant qui revient sur
la construction de la virilité passe par le blocage des émotions
Témoignages d'hommes actuels y compris de papas contrairement à ce que pourrait laisser penser l'intro.
On y retrouve une opposition ancienne et stéréotypée entre :
la raison, la force, le contrôle, le dominant (Homme) vs. les émotions, faiblesse, dominé (Femme)
Vers 14min30 - Olivia Gazalé, [¹] [²]
La preuve virile ne traduit rien d'autre qu'une angoisse démesurée devant les ambiguïtés de l'identité mâle.
15 min. l’écrivain et poète britannique JJ Bola auteur de l’essai sur les masculinités Mask Off: la masculinité redéfinie rappelle l'évolution historique des stéréotypes de la virilité comme les chaussures à talons. A l'origine les chaussures à talons viennent de cavaliers perses et le roi de France Louis XIV en portait. Il fallait pour les hommes aristocrates avoir les talons les plus hauts pour paraître riches car elles coûtaient cher.
Idem pour les larmes qui sont devenues au XIXe siècle un attribut féminin alors que les hommes au XVIIIe siècle pleuraient et se montrer pleurant en public, au théâtre.
Renversement au tournant du XIXe siècle :
- via une rhétorique chrétienne (larmes = repentance, contrition) les gens qui pleuraient au XVIIIe étaient "des buveurs de sang" car révolutionnaires.
- via instauration du service militaire homme obligatoire pour les jeunes dès 1798 où il fait faire taire la sensibilité du garçon pour en faire un soldat. On leur enseigne que la violence est intrinsèque, qu'elle fait partie d'eux.
Au niveau psychologique, la société depuis le XIXe siècle fait intérioriser aux petits garçons (sans que ça soit nécessairement verbaliser par leur entourage) le fait de bloquer ses émotions (et ses larmes) pour faire comme son père (ses pairs) et c'est un peu comme un rite initiatique dans l'âge adulte des hommes vers 12-13 ans.
Selon le documentariste Sikou Niakaté, l'environnement dans lequel on vit et grandit est hyper dé-formateur. Dans milieux sociaux pauvres, défavorisés,
dans les quartiers où il y a une dépossession économique et culturelle de dingue où la seule chose qui nous reste c'est notre corps et des métiers liés au corps, être femme de ménage, agent de sécu, être manutentionnaire...
Notre métier est primordial pour survivre.
Musculature et paraître dangereux avec son corps c'est la dernière dignité que les hommes ont, car ils savent qu'ils sont dominés socialement et financièrement, mais faut pas que ça se voit (en bloquant ses émotions).
Inversement seuls les hommes ayant prouvé leur virilité, dans le sport ou dans leurs accomplissements (tennisman, footballeur, etc.) peuvent pleurer (de joie) c'est bien vu. C'est normalisé pour les athlètes hommes, forts, talentueux, riches = critères pour juger de la norme d'un homme.
De plus le sport reproduit en quelque sorte la guerre avec un gagnant et un perdant il est attendu qu'un homme se sacrifie et qu'on puisse voir ses émotions, car son statut d'homme n'est pas menacé.
[¹] : Olivia Gazalé, Le mythe de la virilité, un piège pour les deux sexes
[²] : > Pour asseoir sa domination sur le sexe féminin, l'homme a, dès les origines de la civilisation, théorisé sa supériorité en construisant le mythe de la virilité. Un discours fondateur qui n'a pas seulement postulé l'infériorité essentielle de la femme, mais aussi celle de l'autre homme (l'étranger, le « sous-homme », le « pédéraste »…). Historiquement, ce mythe a ainsi légitimé la minoration de la femme et l'oppression de l'homme par l'homme. source
Sources du podcast :
- À lire sur le sujet :
Il est juste que les forts soient frappés de l’écrivain et éditeur Thibault Bérard, Éditions de l’observatoire
Mask Off: Masculinity Redefined du poète JJ Bola, éditions Pluto Press
Histoires des larmes de l’historienne des sensibilités Anne Vincent-Buffault, édition Payot
Hommes et femmes face au deuil de la psychotérapeute Nadine Bauthéac, éditions du Seuil
- À voir sur le sujet :
Dans le noir, les hommes pleurent du documentariste Sikou Niakaté
Interview vidéo - Olivia Gazalé met en avant "Le mythe de la virilité"* - La grande librairie (14 min.) mars 2019